SINE DOMINICO, NON POSSUMUS!
Nous sommes en 304 dans la cité d’Abitène en l’actuelle Tunisie.
Quarante-neuf chrétiens sont « surpris » au domicile d’Octave Félix en train de célébrer l’eucharistie dominicale. Pris en flagrante désobéissance vis-à-vis du dieu impérial.
L’empereur Dioclétien a farouchement interdit tout rassemblement, toute expression de foi. Déportés à Carthage, les membres de ce groupe seront fidèles jusqu’au bout à leurs convictions. Ils diront à leurs bourreaux : « Sine dominico, non possumus! » Sans le dimanche, nous ne pouvons vivre. En 2005, Benoît XVI rendit hommage à ces martyres trop méconnus, reconnaissons-le.
Quelle force d’âme! Avoir saisi que si le dimanche est Jour du Seigneur, ne pouvoir se rassembler pour en célébrer la dimension pascale est l’équivalent de ne plus pouvoir vivre.
Ici, l’expression dépasse une « revendication ». Elle dit qu’il est question de vie ou de mort spirituelle.
En 2021, qu’advient-il de notre dimanche ? La sacralisation hédoniste n’a-t-elle pas pris le dessus? Serions-nous déterminés et cohérents comme le furent les croyants d’Abitène ?
Évidemment, on objectera la raréfaction des possibilités de messes en nombreux lieux.
On argumentera du côté de la sécularisation de la société.
On cherchera à contextualiser…
Demeurera pourtant, au-delà de ces conjectures, l’enjeu essentiel.
Bien au-delà d’une faisabilité, y a-t-il en nous un désir du Christ qui surpasse toute mesure?
Les custodes, affectueusement emportées par les pratiquants du dimanche à l’intention de leurs frères malades ou empêchés, ne signifient elles pas que, pour ces fidèles, une banalisation du dimanche est inconcevable ?
Ceux qui ont possibilité de se rassembler pour la grâce de l’eucharistie mesurent-ils la souffrance de ceux qui en sont privés ?
La Covid ayant brouillé de nombreux repères, il serait bien de se ressaisir dans ce qui fonde notre être chrétien.
Les fidèles du Christ n’imposent évidemment pas à la société et à leur entourage leur conception et leur pratique.
Mais il leur incombe de ne pas relativiser la relation vitale qui doit être la leur au dimanche.
Et de rappeler, qu’indépendamment de toutes convictions religieuses, protéger une certaine qualité dominicale, c’est aussi préserver la société d’une perte de son centre de gravité existentiel.
Merci à celles et ceux qui, en tous points du diocèse, prennent soin du rassemblement eucharistique.
Que les martyres d’Abitène nous éclairent dans l’aujourd’hui de notre Église !
Mgr Bernard Podvin
Missionnaire de la Miséricorde.